Le jeudi 25 août 2022, Anaëlle s’est lancée au départ du Grand Raid des Pyrénées (GRP, le tour du Moudang ! Un 63km avec un D+ de 4000m environ !!! Aujourd’hui elle nous raconte son aventure !
Comment t’es venue l’idée de participer à ce trail
Anaëlle : Sur un coup de tête après avoir été taquiné par Yves (super traileur) qui emmenait Kelvin sur le 80km. Il y a toujours une part d’inconscience et une envie de se dépasser. Je me sentais en confiance de partir avec ces deux fous.
Avais-tu déjà participer à ce genre de course ?
Anaëlle : J’avais déjà fait 35km et 1600D+ sur l’hivernale des templiers grâce à une amie Léa qui est une très bonne traileuse expérimentée. Mais j’avais été malade et anémiée j’ai vécu l’effort en serrant les dents.
Comment te sentais-tu à l’approche de ce trail (les dernières semaines) ?
Anaëlle : Un peu angoissée car je ne me suis pas entraînée comme j’aurais dû. J’ai augmenté trop rapidement la charge sur la prépa après le semi et ai ressenti de nouveaux des douleurs au genou sur les séances de dénivelé. J’ai donc diminué drastiquement pour faire du vélo. S’ajoute à cela un quotidien bien chargé avec un déménagement et le travail, comme tout le monde il est difficile d’être disciplinée et de garder le même investissement du début à la fin.
Comment as-tu vécu ce trail de l’intérieur ?
Anaëlle : C’est une aventure en pleine nature. Les paysages sont sublimes et on prend peu le temps de lever les yeux. Le GRP ce sont des parcours très sauvages. Lorsqu’on lève les yeux nous apercevons des lacs et des cascades, nous traversons des lits de rivières, des pierriers. Au départ nous sommes 1200 coureurs qui démarrent l’ascension du col du Portet à la frontale les uns à la suite des autres. Les premières difficultés s’installent et le soleil se lève sur les cols. Un silence religieux s’installe pendant plusieurs heures, seules les cloches des troupeaux de vaches retentissent dans les montagnes. C’est aussi une aventure humaine les bénévoles sont formidables, une jeune femme de La Rochelle au tunnel de Bielsa me félicite tout en remplissant mes flasques et me dit que je suis 6eme ou 7eme femme, je la remercie chaleureusement d’être là pour nous et suis très touchée par cet échange court mais plein d’admiration mutuelle. Et il y a des morceaux de courses que tu réalises avec 1-2,3 personnes et tu te sens en harmonie avec ces inconnus qui vivent le même effort que toi c’est très fort, ça te rend un peu plus humain d’être dans le dur !
Une anecdote (ou plusieurs) sur ton parcours ?
Anaëlle : Une anecdote pas très joyeuse, après le 45eme km le soleil se lève, il fait plus chaud, et je vide plus rapidement mes flasques et nous avons passé le dernier col, après une longue ascension je pense avoir les jambes et la descente s’amorce. On part pour 2h30 de descentes et en fait je suis fatiguée et les quadriceps brûlent, le genou aussi. Moins solide sur les appuis les descentes sont techniques et me demandent beaucoup de concentration, les sentiers sont étroits et abruptes, il y a des trous partout, ça descend en lacet avec des cailloux qui roulent. 47-48eme km perte de lucidité légère déshydratation et je chute bêtement en voulant prendre un gel en courant (débile!), je m’accroche à la végétation comme je peux et j’appelle à l’aide sur ce tronçon où je suis seule, un mec fait illico demi tour et vient me repêcher, je devais être à 15-20m au dessus d’un lit de rivière. On fait un bout de chemin ensemble et un groupe de 3 traileurs me dit de mettre au centre de leur groupe pour être plus a l’abris.
Quelle difficulté as-tu ressenti lors de la course ? Et comment les as-tu surmontées ?
Anaëlle : Étonnement j’ai plutôt bien dosé l’effort sur les ascensions, mains sur les cuisses, un pas après l’autre et en discutant avec Marie notamment s’est passé plus rapidement. (Marie fait d’ailleurs 6eme féminine trop costaud la nana). La présence de Yves et Vincent son frère et Kelvin m’ont donné un coup de boost au moral mais pas que, ils t’aident aussi à remplir tes flasques de boisson iso, ont un mot d’encouragement et ce soutien n’a vraiment pas de prix que tu sois en forme ou non, tu sais que tu les retrouves 2-3h plus tard. 10h30 de course c’est long ! La vraie difficulté ce sont les descentes qui demandent beaucoup d’endurance musculaire et de concentration. c’est épuisant et très technique il y a un vrai danger en montage et il ne faut pas y aller comme un barjot en étant inexpérimenté. Et pour finir l’alimentation c’est très compliqué, sur ces distances tu dois te forcer à manger pour ma part le solide ne passait pas comme pour beaucoup les gels m’ont sauvé.
Alors ces paysages ? Beaux ? As-tu pu en profiter ?
Anaëlle : On prend peu le temps de lever les yeux mais ces tableaux sur la nature consolent de la difficulté de l’effort. La puissance de cette nature te rend humble et tu te sens bien démunie avec ton petit matos de coureur. C’est très impressionnant de voir que des hommes et des femmes ont bâti ces villages et aménagés cette nature sublime mais aussi hostile. J’ai adoré m’arrêter pour remplir mes flasques dans les rivières où l’eau est pure c’est formidable.
Quels conseils donnerais-tu pour celles et ceux qui voudraient faire un trail en haute montagne ?
Anaëlle : Je ne sais pas si je suis très à même de conseiller quelqu’un étant donné que je manque d’expérience et que je fais plein d’erreur. Je dirais qu’il ne faut pas se lancer sur de très longues distances sans un bon volume d’entraînement course à pied. S’il y a beaucoup de dénivelé, orienter sa préparation sur des séances spécifiques dénivelées est essentiel. Bien s’équiper c’est important, prendre avec soi le matériel obligatoire donné par les organisateurs de la course. Si le trail se passe en montagne, réaliser un week-end choc en montagne 1 mois avant durant sa préparation est préférable afin de ne pas être surpris du terrain et pour casser des fibres musculaires et avoir le temps de bien se réparer. Un truc un peu bête auquel on ne pense pas, les sous-vêtements c’est très importants car ça crée des zones de frottements qui peuvent blesser. La tenue doit être tester sur une distance longue pour s’assurer qu’elle ne blesse pas. Un mauvais équipement est un vrai handicap technique.
Comment te sentais-tu à l’arrivée ? Et aujourd’hui ?
Anaëlle : J’ai mal géré la fin de la course. Les 10 derniers km voir les 6 derniers ont été une épreuve, j’étais épuisée, les 5 derniers km je ne pouvais plus courir ça continuait de descendre alors j’ai ouvert mon téléphone et j’ai écrit à l’asso, j’ai reçu énormément de soutien. Je voulais pas faire une heure de marche j’ai donc appelé Kelvin qui m’a dit de me focaliser sur le balisage (et oui quand tu manques de lucidité tu peux te perdre même à 3km de l’arrivée) et qu’il venait me chercher. Il a grimpé 4 bornes pleine balle pour me retrouver, j’ai recommencé à courir quand j’ai su qu’il arrivait. Il m’a accompagné jusqu’à l’arrivée. A 1,5km de l’arrivée c’est une vague d’émotion qui te submerge, l’ambiance est incroyable et tu oubli presque ta douleur galvanisée par les félicitations de chaque supporter. Les supporters sont sur les routes, les chemins et à l’arrivée, ils crient bravo et ton prénom en lisant ton dossard, c’est très touchant. Et tu franchis la ligne d’arrivée après 10h30 de course et un départ à 5h30. À l’arrivée tu penses que tu vas te ruer sur la nourriture mais pas vraiment, l’épuisement te coupe un peu l’appétit. On te remet ton tee-shirt et ta médaille de finisher. Tu arrives au ravito un peu stone, les bénévoles sont formidables à ce moment là car ils décryptent ce dont tu as besoin. Autour de la fontaine pour tremper pieds et jambes j’ai retiré mes chaussettes et ai fait peur a tous les voisins. Sacrées cloques, un conseil mettre de la crème anti frottement !
Alors, et maintenant ? Quel est ton prochain défi ?
Anaëlle : J’ai appris énormément et ai eu une belle frayeur en chutant à 15km de l’arrivée. Je ne sous-estimerais plus une fin de course, ni les descentes. Se lancer des défis c’est galvanisant, ça te motive et te fixe des objectifs à atteindre mais le trail est un sport dangereux et l’on a tendance à minimiser la difficulté des efforts et des distances. Je ne sais pas si je suis faite pour ça ni pour des ultra distance. J’ai pris énormément de plaisir et je crois que si je me lance sur un format plus long en montagne je serais plus assidue à l’entraînement et prendrai un(e) coach. Je crois que je vais faire beaucoup plus de vélo et il y a des distances route que je souhaite expérimenter. Soit améliorer mon temps sur un semi ou un 10km ou bien me préparer pour un marathon.
Un mot pour les We runners ?
Anaëlle : Pfffiou… je suis quelqu’un de très fière et je dois me sentir sacrément en confiance, comme avec ma propre famille, pour vous écrire sur watsapp à deux doigts de pleurer, lessiver jusqu’à la moelle à 3km de l’arrivée. Je sais aussi que chacun de vous a déjà vécu ces difficultés. Partager sans honte ses doutes et ses douleurs c’est ça la vraie fraternité, c’est ça le sport : L’entraide ! C’est dire à quel point l’association est bienveillante et faite d’homme et de femme sportifs, humains et chaleureux. J’ai senti durant la course toute cette énergie que we run m’a envoyé. J’ai lu avec attention chacun de vos messages, j’ai ri, et ai été très émue. Je ne cours pas depuis très longtemps, toute ma progression et mon implication c’est we run qui me l’a apporté mené par Juju qui croit en chacun de nous. Donc voilà une association faite de gens sérieux mais qui ne se prennent pas au sérieux, des coureurs expérimentés mais humbles qui reconnaissent la valeur de l’effort et sur qui on peut compter. J’espère être présente pour vous !
UN GRAND MERCI à Anaëlle pour nous avoir fait partager son expérience ! Et surtout un ENORMISSIME BRAVO pour sa performance, elle peut être fière d’elle ! En tout cas nous, on est tous très fiers d’elle, tellement contents d’avoir une fille comme elle dans notre asso !